
Interview de Cristina CANTALLOPS VILÀ, doctorante en biotechnologie/ microbiologie appliquée
Cristina CANTALLOPS VILÀ, étudiante en 4e année de doctorat en biotechnologie/ microbiologie appliquée s’attaque à l’un des défis majeurs de la santé moderne : la résistance aux antibiotiques. Passionnée et engagée, elle nous parle de son parcours, de ses recherches prometteuses et de ses ambitions pour l’avenir.
Parcours académique
Cristina : Originaire de Barcelone, j'ai obtenu une licence en Biotechnologie à l'Université de Barcelone, suivie d'un master en Microbiologie Appliquée à l'Université Autonome de Barcelone. Durant ma licence, j'ai eu l'opportunité de réaliser un stage à Stockholm sur les protéines antimicrobiennes, puis un autre à Barcelone sur les biosenseurs microbiens pendant mon master. Ces expériences m'ont confortée dans mon ambition de me consacrer à la recherche, en particulier dans des projets combinant biotechnologie et microbiologie. C’est l’intérêt pour ce thème de recherche qui m’a amenée à étudier à l’université Polytechnique Hauts-de-France, sur le site de Cambrai, dans le cadre d’une mobilité étudiante durant mon doctorat.
Recherche actuelle
Cristina : Face à la résistance croissante aux antibiotiques et à la formation de biofilms*, il est crucial de développer de nouvelles stratégies antimicrobiennes. Ma recherche se concentre sur le développement et l'évaluation de biomatériaux antimicrobiens innovants utilisant des peptides antimicrobiens pour prévenir ou traiter les infections orthopédiques. Ces peptides, produits par les humains, les insectes et les microbes, sont capables de neutraliser ou d'inhiber certaines espèces de pathogènes avec un très faible taux de résistance bactérienne, ce qui en fait des candidats prometteurs pour les thérapies antimicrobiennes.
Dans les faits, mes travaux visent à développer des biomatériaux antimicrobiens pouvant être utilisés pour prévenir ou traiter des infections osseuses, en particulier celles associées aux prothèses orthopédiques. Ces matériaux pourraient par exemple être utilisés pour recouvrir des implants afin de limiter l’adhésion bactérienne, ou pour délivrer localement des antimicrobiens au site d’infection. L’objectif est de réduire l’usage systémique d’antibiotiques et le risque de résistance.
Motivations
Cristina : Ce qui me motive, c'est la volonté de développer des biomatériaux antimicrobiens innovants pour relever le défi mondial de la résistance aux antibiotiques. De plus, la biotechnologie et la microbiologie sont des domaines qui me passionnent profondément.
Avenir
Cristina : Après mon doctorat, je souhaite poursuivre une carrière académique et continuer mes recherches dans ce domaine, avec l'espoir de contribuer à la transition des stratégies antimicrobiennes vers des applications cliniques. En plus de la recherche, j'aimerais consacrer du temps à l'encadrement et à l'enseignement.
Conseils pour les étudiants envisageant un doctorat
Cristina : Un doctorat est axé sur une recherche très spécialisée et demande un engagement important en termes de temps et de motivation. Il est essentiel de trouver un sujet qui vous passionne et une équipe qui vous soutienne et vous encourage.
Pour l’anecdote, au cours de ma thèse, nous avons traversé, mon encadrante et moi-même, une période difficile où les résultats expérimentaux contredisaient les attentes du plan initial. Il a été compliqué, pour elle comme pour moi, d’accepter que la stratégie prévue ne fonctionnait pas comme espéré. Nous étions investies dans cette idée, ce qui rendait l’adaptation difficile. C’est en discutant avec d’autres collègues et chercheurs que de nouvelles approches, plus en phase avec les résultats observés, ont pu émerger. Ces échanges ont été déterminants pour nous aider à prendre du recul, ajuster les objectifs, et rebondir. Cette expérience m’a appris que la recherche exige une grande capacité d’adaptation, et que le dialogue est souvent la clé pour sortir d’une impasse.
*définir les Biofilms
Les bactéries peuvent exister sous deux formes principales : soit en flottant librement dans un liquide (on parle alors de forme planctonique), soit regroupées en communautés structurées appelées biofilms. Dans un biofilm, les bactéries s’attachent à une surface — qu’il s’agisse d’un dispositif médical, d’une canalisation ou même d’un tissu humain. À l’intérieur de cette structure, elles produisent une matrice protectrice, rendant difficile l’accès des antibiotiques et des cellules immunitaires. Cet environnement protecteur permet aux bactéries de survivre et de persister, ce qui fait des biofilms un véritable défi dans le domaine de la santé.
Biomatériaux aux propriétés antimicrobiennes
Pendant ma thèse, j'ai travaillé sur le développement de biomatériaux aux propriétés antimicrobiennes. Ces biomatériaux peuvent être utilisés comme prothèses orthopédiques ou pour délivrer des agents antimicrobiens directement sur le site de l'infection. Ils doivent répondre à deux critères principaux : (1) être biocompatibles, c’est-à-dire non toxiques pour les cellules humaines et, si possible, favoriser leur croissance (flèche noire), et (2) être capables d’éliminer ou d’inhiber les bactéries pathogènes (flèche rouge).
